"Des
airs
de
musique
ancienne
qui
sonnent
comme
des
standards
de
jazz
:
ce
pourrait
être
un
concept...
c’est
une
révélation.
On
s’était
habitué
à
honorer
Purcell,
Dowland,
Monteverdi
comme
des
maîtres,
à
les
servir
et
à
leur
rendre
hommage.
Et
voilà
que,
bouillonnant
de
talent
et
d’irrévérence,
portés
par
une
jubilation
crâne,
les
cinq
musiciens
de
Music
4
a
While
leur
rendent
tout
simplement
la
vie.
Voir
le
groupe
en
concert
suffit
à
se
convaincre
qu’on
assiste
à
une
résurrection.
La
Magie
opère
dans
des
salles
confidentielles
ou
sur
des
scènes
prestigieuses,
devant
un
public
profane
ou
auprès
des
connaisseurs...
Et
quand
les
jazzmen
les
plus
pointus,
épatés
et
ravis,
marquent
la
mesure
sur
une
tarentelle
traditionnelle,
ou
sur
une
musique
de
cour
de
Gabriel
Bataille
( écrite
pour
Louis
XIII
! ),
puis
retiennent
leur
souffle
lors
du
Flow
My
Tears
de
Dowland, “premier
blues
de
l’histoire”,
on
se
dit
que
oui,
en
effet,
il
se
passe
vraiment
quelque
chose.
L’aventure
commence
à
Liège,
en
Belgique,
par
la
rencontre
d’un
pianiste
prodige
et
d’une
soprano
à
la
voix
hors
norme,
Johan
Dupont
et
Muriel
Bruno
:
deux
natures
intuitives,
dotées
d’une
sensibilité,
d’un
souffle
et
d’une
folie
qui
se
répondent.
Ils
aiment
ce
répertoire,
ils
le
jouent.
André
Klenes,
maître‐contrebassiste,
les
rejoint
rapidement.
Ce
samouraï
de
l’archet
met
toute
sa
rigueur,
toute
son
expérience
et
toute
sa
classe
dans
la
balance.
Deux
garnements
hyperdoués
viennent
compléter
la
petite
bande :
à
la
clarinette,
esprit
de
l’air
fougueux
et
infatigable,
JeanFrançois
Folliez
;
au
violon,
ragazzo
tout
en
élégance
et
panache,
Joachim
Iannello.
Ces
cinq‐là
sont
aux
anges.
Ils
jubilent
de
s’être
trouvés...
et
de
semer
ensemble
le
trouble
et
la
joie
de
vivre.
D’un
set
à
l’autre,
le
temps
passe
vite,
très
vite.
En
maîtresse
de
cérémonie
sensuelle
et
facétieuse,
Muriel
Bruno
faufile
souverainement
sa
voix
boisée
entre
les
notes
de
ses
comparses.
De
la
dentelle !
Et
par
un
petit
miracle
d’écoute
et
d’équilibre, le
talent
de
chacun
trouve
pleinement
sa
place
et
son
rayonnement.
Portés
par
un
même
élan,
gorgés
de
la
même
sève,
les
cinq
musiciens
accomplissent
l’authentique
célébration
d’une
musique
rendue
à
son
état
naturel.
On
respire,
on
rit,
on
s’émerveille...
Que
du
bonheur
!"
Steve
Bottacin- BE Décembre 2013
" ... On est frappé par l’interprétation très volontariste et par l’engagement perceptible de la chanteuse lyrique Muriel Bruno. Il est incontestable que ces artistes ne se contentent pas de maitriser leur art, ils y donnent du cœur ! L’interprétation des pièces du répertoire est autant rigoureuse qu’est libre l‘improvisation qui suit l’exposé du thèmes des pièces. La présence du piano surprend et apporte une couleur contemporaine car il convient de rappeler que l’instrument était absent de la musique ancienne, l’usage du piano moderne datant de la fin de XIX ème siècle. (...) Les mélomanes habitués aux interprétations conventionnelles de Monteverdi et Purcell vont peut-être tomber de leurs chaises, mais cette initiative-là est habitée par une belle intention : celle de redonner vie à un répertoire. Plus que la volonté de faire tomber de symboliques frontières stylistiques, on retiendra que le talent instrumental de ces artistes s’efface finalement derrière une interprétation enthousiasmante, parfois festive et réellement communicative."
lire l'article complet paru dans" La République du Son" ( 08/01/2016)
"Tout musicien, après un processus d’apprentissage, par la tradition orale ou via un cursus classique, en académie et au sein d’un conservatoire, devient interprète, parfois arrangeur, compositeur ou même improvisateur. Le musicien apprend, imite et accède ensuite, par la maturité, au stade de la création qui donnera naissance à un style particulier, à une sonorité propre.
L’origine de « Music 4 A While », un concept au carrefour des musiques anciennes et de l’esprit du jazz, remonte à Johan Dupont, un jeune pianiste (1984), formé au Conservatoire Royal de Liège, et dont le tempérament s’est forgé par la pratique intense du piano-bar et de concerts improvisés dans les estaminets du Pays de Liège, sans oublier les sonorités du piano, dans l’appartement familial, joué quotidiennement par le père, Marc Dupont, ancienne figure du monde musical liégeois. Autrement dit, la musique populaire, Johan Dupont la pratique, la vit, et depuis longtemps !
On ne s’étonnera donc pas qu’un répertoire qui convoque les compositeurs européens des XVIe et XVIIe siècles s’est présenté sur son chemin . En effet, en ce temps-là, « mon bon monsieur », les musiciens ne se contentaient pas d’interpréter, mais on attendait d’eux qu’ils apportent une touche personnelle, en improvisant sur la mélodie, sur le rythme, au travers de toccata, fantasia ou prélude, pour n’évoquer que quelques codes de l’époque. Voici plusieurs siècles déjà, la musique écrite s’enrichissait d’improvisations, cette forme de composition dans l’instant, et bien au-delà de la simple ornementation, parfois même jusqu’à la dissonance, comme dans la pratique de l’appogiatura. Bref, les similitudes entre l’esprit du Baroque et celui du jazz ne manquent pas, ce qui, selon certains musicologues hardis, place Johan Sebastian Bach parmi les plus grands improvisateurs de l’histoire de la musique. Ah, si les techniques de reproduction de la musique avaient existé en ce temps-là…
Revenons à Johan Dupont, qui n’est pas juste un pianiste ou encore un premier prix de piano de plus. Il est inclassable, et passe ainsi, en une semaine, de Big Noise, une formation populaire qui s’inscrit dans la tradition du jazz New Orleans aux nombreux concerts improvisés, dans lesquels il revisite Gainsbourg, Wagner ou encore Duke Ellington, mais toujours avec la « touche Dupont », cette troisième oreille qui lui permet d’interpréter My Funny Valentine avec un glissando à la Chopin, en forme de coda ! En 2012, Johan Dupont rencontre la soprano Muriel Bruno, désireuse de s’encanailler avec lui sur les rives de la note bleue. Dès le premier rendez-vous, une passion commune se révèle, la musique de John Dowland, luthiste et compositeur anglais du XVIe siècle. On se souviendra ici du remarquable travail réalisé en 2006 par Sting, sur l’album « Songs of the Labyrinth » enregistré pour le label mythique Deutsche Grammophon. Très vite, au croisement des univers du pianiste et de la soprano, on va trouver le troisième larron, le contrebassiste André Klenes, de formation classique, mais rapidement contaminé par le virus du jazz. En effet, des mises en musique de Rimbaud et de Prévert, au jazz mâtiné de tango, sans oublier les nombreuses collaborations en musiques contemporaines et en chansons françaises, André Klenes ne pouvait pas ne pas participer à l’aventure de Music 4 A While.
Autour de ce noyau, la relecture contemporaine de Dowland, Monteverdi, Purcell ou encore Bataille pouvait commencer. Johan Dupont s’est donc mis au travail, et d’arrangements en arrangements, de répétitions en concerts « try out », il va compléter le trio par deux complices de son premier cercle, le violoniste Joachim Iannello – retenez bien ce nom ! – et le clarinettiste Jean-François Foliez, un tout terrain du monde des musiques actuelles. Ensuite, l’opportunité de l’enregistrement pour le label Igloo va enrichir l’instrumentarium du groupe grâce à l’apport du tromboniste Adrien Lambinet, sur Flow My Tears de Dowland, de Joannie Carlier au basson, impressionnante de virtuosité sur Come Away, Come Sweet Love de Dowland, on la retrouve aussi sur The Three Ravens de Thomas Ravenscroft et Un Satyre Connu de Gabriel Bataille, et enfin du percussionniste Etienne Plumer dont le jeu efficace et tout en nuances sur Lida Spina del Mio Corede Monteverdi mériterait d’être étendu à d’autres titres.
Le premier album de Music 4 A While compte dix titres, un peu plus de cinquante minutes de musiques enregistrées qui révèlent les premiers pas d’un concept déjà expérimenté par d’illustres ancêtres comme le Modern Jazz Quartet ou encore Dave Brubeck. Sauf qu’ici, la bonne idée vient du choix des compositeurs et des titres. Le pari est en grande partie réussi, même si, comme souvent, le temps et la rencontre avec les publics permettront d’élaguer les excroissances, de ciseler certaines expressions et d’atteindre la voix juste d’une musique devenue intemporelle. La musique, n’est-elle pas par excellence cette expression artistique qui tutoie l’invisible et se moque des frontières de l’espace-temps?"
Philippe Schoonbrood 27 juin 2013 Le site Jazzaround